Revisiter nos traditions

Publié le 14 Octobre 2012

ecouter Ecouter la prédication                     PDF Télécharger le texte de la prédication

Lecture biblique : Marc 2.18-3.6

Le jeûne et le sabbat. Deux pratiques religieuses importantes dans le Judaïsme. Et pour certaines personnes, en particulier les Pharisiens, Jésus est un peu trop laxiste sur ces questions ! Il tolère certaines attitudes de ses disciples et il se comporte lui-même d'une façon qui n'est pas acceptable. 

Jésus est accusé... comment se défend-il ?

 

Le jeûne, ce sera pour plus tard !

Le jeûne... Tout le monde le pratiquait. Non seulement les Pharisiens mais aussi les disciples de Jean-Baptiste. Alors pourquoi Jésus et ses disciples ne jeûnaient pas ? La question semble troubler au-delà des chefs religieux. Le texte biblique dit que "des gens" viennent poser la question à Jésus. 

Je ne suis pas sûr qu'ils aient bien compris la réponse proposée par Jésus. Qu'ont-ils saisi de cette histoire de mariage et de marié ? En gros, il leur dit que le moment n'est pas venu pour eux de jeûner. C'est le temps de la joie, de la fête. Mais il précise aussi que le temps du jeûne viendra, plus tard, avec des heures beaucoup moins joyeuses pour ses disciples.

Jésus ne s'oppose pas au jeûne en tant que tel. Il souligne simplement que c'est une pratique qui se justifie dans certains contextes. Il prend donc le contrepied d'une approche légaliste qui voyait le jeûne comme une pratique "obligatoire", un incontournable de la piété du croyant. 

 

Le sabbat a été fait pour l'homme...

Le sabbat est un sujet encore plus délicat. Et ce sont d'abord les disciples de Jésus qui sont critiqués... et donc aussi Jésus qui les laisse faire ! Ils sont pris en flagrant délit : un jour de sabbat, ils se permettent de glaner des épis dans un champ. 

La loi de Moïse ne dit-elle pas : 

Vous travaillerez pendant six jours, mais le septième jour, vous arrêterez de travailler, même au moment des labours ou des récoltes. (Exode 34.21)

La réponse de Jésus est assez étonnante à nouveau. Il n'essaye pas d'argumenter pour savoir si glaner des épis est vraiment travailler... Il répond en faisant référence à un épisode biblique, qui n'a rien à voir avec le sabbat. Le roi David s'est autorisé à manger les pains offerts à Dieu, pains réservés pour les prêtres. Et il en a même donné à ses hommes. Il n'avait pas le droit de faire cela. Pourtant il l'a fait... C'était un cas de force majeure, David était en danger et avait faim. Et dans ce cas, le prêtre lui-même a autorisé David à manger ces pains. 

Les commandements, les interdits ne doivent pas être compris comme des absolus auxquels se soumettre sans réfléchir.

Alors Jésus revient au sabbat. Certes, c'est un commandement de Dieu. Mais Dieu n'a pas donné ces commandements juste pour qu'on les observe servilement. Il les a donné pour être des repères dans notre foi et notre vie de croyant. "Le sabbat a été fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat..." 

Un commandement est au service du croyant, pas l'inverse. Il est donné pour l'aider à mieux aimer Dieu et son prochain. Pas pour l'enfermer dans un carcan. 

 

Aimer son prochain d'abord !

Mais ça ne plaît pas aux Pharisiens... La preuve : Jésus est observé, épié, alors qu'il se rend à la synagogue un jour de sabbat. Et là, avouons-le, ça devient un peu surréaliste... Parce que la grande question est de savoir non pas si Jésus va violer le sabbat en travaillant mais s'il va oser guérir un infirme ! On marche sur la tête ! 

Jésus va saisir l'occasion pour dire clairement ce qu'il en pense. Oui, il va guérir cet infirme, mais en plus il en va en profiter pour enseigner les personnes présentes. Il le fait lever devant tout le monde et interroge les gens présents :

« Le jour du sabbat, qu'est-ce qu'il est permis de faire ? Du bien ou du mal ? De sauver la vie de quelqu'un, ou de le laisser mourir ? »  (Marc 3.4)

Les questions sont tellement évidentes qu'aucune réponse lui est donnée ! Jésus est en colère, face à l'aveuglement, face au carcan légaliste dans lequel ils se sont enfermés. Le respect servile d'un commandement est devenu plus important que l'amour du prochain... 

Voilà qui nous interroge : où se trouve la fidélité à Dieu ? Dans l'observation servile de commandements ou dans l'amour du prochain ? Dans le fait "d'entrer dans le moule", pour ne pas dire la prison, des stéréotypes du "bon chrétien" ? Ou dans le fait de chercher à aimer en vérité Dieu et son prochain, quitte à sortir un peu du cadre parfois ? 

 

Une juste perspective

Jésus ne s'oppose ni à la pratique du jeûne, ni au respect du sabbat. Il se contente de les remettre dans une juste perspective. Ce qu'il dit du sabbat est vrai pour tous les commandements, toutes les traditions, toutes les pratiques religieuses. 

"Le sabbat a été fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat !"

Jésus nous invite à revisiter nos traditions et nous interroger si nous n'en sommes pas prisonniers. Parce que, ne vous faites pas d'illusion, les traditions ne sont pas seulement pour les autres, les catholiques ou les orthodoxes. Nous autres, bons chrétiens protestants évangéliques, nous avons aussi nos traditions ! 

Des traditions sur le culte : les cantiques, les prières "libres" (mais dans lesquelles on retrouve toujours les mêmes formules), la façon de vivre la Cène, etc... Des traditions sur la piété personnelle : ce que doit être le "culte personnel" du chrétien... Des traditions dans notre lecture de la Bible, des schémas d'interprétation que nous ne remettons même plus en cause, au risque de les plaquer artificiellement sur la Bible parfois...

Pour paraphraser Jésus, on pourrait dire que "ces traditions sont faites pour le croyant et non le croyant pour ces traditions." Si elles nous aident à aimer Dieu et notre prochain, alors tant mieux ! Mais osons parfois sortir un peu de leur cadre, explorer d'autres voies, pour ne pas passer à côté de ceux qui ont besoin de nous, comme l'infirme que Jésus a guéri dans la synagogue. 

 

Conclusion

Accusé, Jésus se défend. Ou plutôt il réplique. Parce que ce n'est pas lui qui est condamnable mais ceux qui l'accusent. 

Il prend un peu de liberté avec les traditions ? C'est pour les replacer dans une juste perspective. Ses contradicteurs, eux, sont prisonniers de leurs traditions, incapables de discerner l'essentiel. Incapable même d'envisager faire du bien autour d'eux simplement parce qu'il faut respecter servilement des commandements. 

Et ça, ce n'est pas l'Evangile ! L'Evangile libère des carcans. L'Evangile nous ouvre sur Dieu et notre prochain. Il nous pousse à revisiter nos traditions, et le cas échéant nous en écarter, s'il le faut. 

"Le sabbat a été fait pour l'homme et non l'homme pour le sabbat." L'important, c'est moins le sabbat que l'homme. C'est moins le commandement que l'amour. C'est moins les traditions que mon prochain. 

Rédigé par Vincent

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
B
Comme tout cela est juste et bien dit...ce que est drole c'est que ton theme de predication etait exactement celui que nous avons partage lors de ce meme week a Albi en prive avec nos amis.Son<br /> developpement allait aussi dans le meme sens...UNION en Christ
Répondre